• Prise en charge de l'autisme : la "révolution positive" de la Haute autorité de santé

    Doctissimo - le 08-03-2012

    Prise en charge de l'autisme :
    la "révolution positive" de la Haute autorité de santé

    Très attendu, le rapport de la Haute Autorité de Santé sur la prise en charge de l'autisme classe enfin l'approche psychanalytique comme "non consensuelle". Une avancée pour les associations qui déplorent néanmoins qu'elle n'ait pas été purement et simplement interdite. Ces recommandations devraient bouleverser la prise en charge de cette maladie.

    Deux ans de travail, 145 experts (dont 5 internationaux), une concertation publique à laquelle ont répondu plus de 180 organisations… Le rapport sur les recommandations de bonne pratique sur la prise en charge des enfants et adolescents souffrant de troubles envahissants du développement (TED) a été publié le jeudi 8 mars. Il était très attendu, notamment concernant l'importance controversée de la psychanalyse et du packing en France. Face à ces deux techniques, la Haute Autorité de Santé (HAS) et l'Agence nationale de l'évaluation et de la qualité des établissements et services sociaux et médico-sociaux (Anesm) émettent enfin d'importantes réserves. Une avancée saluée par les associations.

    Une prise en charge personnalisée et globale

    Prise en charge autismeL'enjeu est de taille puisqu'en France, on estime à 30 000 le nombre d'enfants touchés par l'autisme et au total plus de 100 000 touchés par des troubles envahissants du développement (TED). Déclarée Grande Cause nationale en 2012, ayant fait l'objet d'un plan national, l'autisme cristallise les défaillances d'un système médico-social trop peu adapté. Faute d'un diagnostic précoce, la prise en charge intervient le plus souvent trop tardivement, amenuisant ainsi les chances de réussite des traitements engagés. "Seul un tiers des enfants autistes reçoivent à temps l'aide spécialisées qui leur est nécessaire", déplore le Pr Philippe Evrard, président du comité de pilotage Autisme à la HAS.

    Les recommandations de la HAS et de l'Anesm insistent donc sur la mise en place d'une prise en charge précoce, personnalisée et globale, en partenariat avec les parents et l'enfant. Une stratégie qui s'appuie sur un diagnostic précoce (avant l'âge de 4 ans) suivi d'interventions globales et coordonnées dans les 3 mois suivants. Les approches éducatives, comportementales et développementales feront partie intégrante de ces interventions, qu'il y ait ou non retard mental. Les méthodes ABA et TEACCH sont directement citées comme exemples et recommandées.

    Les méthodes cognitives officiellement recommandées

    Ce point ravit le Collectif Autisme*, qui note que "seules sont recommandées les différentes approches éducatives qui ont fait la preuve de leur efficacité comme le montre la littérature scientifique".

    Daniel Fasquelle, député du Pas-de-Calais et président du groupe d'études parlementaire sur l'autisme avoue également se réjouir de "la généralisation des méthodes éducatives et comportementales, et [de] la réaffectation de tous les financements existants à ces méthodes". Car comme le souligne le Pr Evrard, si "les bonnes pratiques permettront une révolution positive pour les personnes autistes(…), il faut néanmoins nécessairement augmenter les moyens et les effectifs, sans quoi, les recommandations ne seront pas appliquées et inutiles".

    Autre point-clé souligné par Jean-Luc Harousseau, président de la HAS : "la prise en charge doit être proposée et non imposée". Depuis une trentaine d'années, les parents se voient le plus souvent imposer l'approche psychanalytique, prédominante jusqu'alors en France.

    Les approches psychanalytiques "non consensuelles" mais pas "non recommandées"

    Pour les adeptes de la méthode psychanalytique, l'autisme n'a qu'une origine psychologique, il serait une psychose causée directement par la mère. Une approche qui s'oppose aux psychiatres, psychologues et médecins qui prônent une prise en charge avec des méthodes éducatives et comportementales. Une curieuse exception culturelle française puisque cette méthode ne fait plus partie de l'arsenal thérapeutique des autres pays occidentaux. Malgré de nombreux débats, ce sont toujours les tenants de cette "doctrine" qui prédominent en France. Mais peut-être plus pour longtemps ! Le rapport reconnaît que "l'absence de données sur leur efficacité et la divergence des avis exprimés ne permettent pas de conclure à la pertinence des interventions fondées sur les approches psychanalytiques et la psychothérapie institutionnelle". Ces approches sont ainsi classées comme étant "non consensuelles"… mais pas comme étant "non recommandées" comme indiquées dans la version préliminaire du rapport qui avait "fuité" en février. Face à l'absence de preuve de son efficacité, au caractère uniquement français de cette approche et à la ferme opposition des familles à son égard, une "non recommandation" aurait pu paraître logique. Et pour les associations, cette nuance n'est pas un détail.

    Le collectif Autisme déplore ainsi dans un communiqué, "que les approches psychanalytiques soient seulement qualifiées de non consensuelles alors qu'aucune étude scientifique ne valide ces pratiques et qu'elles ne correspondent en rien aux besoins des usagers, pourtant un pilier de la construction des recommandations". Un point de vue partagé par Daniel Fasquelle qui "regrette que la HAS ait reculé sous les pressions corporatistes du lobby psychanalytique puisqu'elle a simplement choisi de classer les pratiques d'inspiration psychanalytique dans les "interventions globales non consensuelles"". Pour Jean-Luc Harousseau, président de la HAS, "les psychiatres doivent se remettre en cause et (…) se plier aux règles communes d'évaluation. En 30 ans, il n'y a pas une seule étude capable de prouver l'efficacité de leur approche. Ils doivent prendre conscience qu'il n'existe pas une solution unique". Néanmoins, il précise que "non consensuel ne veut pas dire non recommandé… Les pédopsychiatres qui le souhaitent peuvent continuer à pratiquer s'ils y croient en leur âme et conscience". En ce sens, la HAS n'a pour mission que d'éditer des recommandations de bonnes pratiques et ne peut contraindre les professionnels…


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